Perdu dans la nuit 19 : Confidences

Auteur : Faust
Check : Miss X


Me revoilà ! Ma résolution n’aura pas tenu longtemps sous les agressions d’IRL… Mais j’espère toujours la tenir ! J’ai une semaine de vacances la semaine prochaine qui devrait me permettre de rattraper le retard ~ Enfin, heureusement qu’Aln rencontre d’autres personnes, parce c’est pas gagné avec ses vieilles connaissances… Et je vais arrêter de m’étaler ici ! Bonne lecture !


« AAAAAAAAAAAAAH ! »

Aln était complètement pris de court.

Jion fut sur lui en un instant, et il eut l’impression que son monde s’écroulait. Il n’eut la vie sauve que grâce à la promptitude de la réaction de Rieln, qui s’interposa juste à temps. Leurs lames s’entrechoquèrent bruyamment, le maître épéiste déviant l’attaque sur le côté avec un grognement douloureux. Aln se sentit tiré en arrière et se laissa aller. Son cerveau était bloqué, il ne pouvait détacher son regard du visage de son ami. Il ne lui avait jamais vu cette expression de folie. Quand l’avait-il acquise ?

Il entendait dans le lointain quelqu’un appeler son nom, et cela lui permit de petit à petit reprendre ses esprits.

Revenant tout à fait à lui-même, il jeta un regard affolé autour de lui. La première chose qu’il vit fut la silhouette tendue de Calnig à côté de lui. Ce dernier lui dit d’une voix blanche :

« Aln ? Vous parliez de cela quand vous disiez avoir l’habitude que l’on essaye de vous tuer ? »
Aln le regarda bêtement. Il comprenait les mots, mais il n’arrivait pas à leur donner un sens. En fait, il n’arrivait pas à donner de sens à ce qui se passait. C’était encore plus ridicule que d’habitude. Il tourna alors son regard vers le duel qui se déroulait à quelques mètres de là, et resta bouche bée.

Jion se battait à armes égales avec Rieln. Non, il semblait même avoir un léger avantage. Calnig reprit :

« Ce n’est même pas la peine d’essayer d’aider Maître Eldyn. Nous ne ferions que le gêner. Votre… ami, est un véritable monstre. Il n’est pas humain. »

Aln se leva, commença à marcher vers Jion, disant d’une voix chevrotante :

« Jion, qu-qu’est ce que tu fais ? C’est bien toi non ? »

Les deux combattants se séparèrent.

« Mais qu’est-ce que tu racontes Aln, évidemment que c’est moi ! Tu ne me reconnais pas ? Attends, je me débarrasse du gêneur et on pourra parler du bon vieux temps !
– Jion… Arrête. Ce n’est pas drôle. La blague a assez duré. Range ton épée. Et Rieln n’est pas un gêneur.
– Pas… Un gêneur ? Aln, tu ne vois pas ? C’est une Ombre ! Je l’ai vu tuer les… les ? Les quoi ? Qu’ai-je vu ? Pas une Ombre. Aln a détruit le village ? Je dois tuer Aln. Oui, je dois parler du bon vieux temps avec lui…Haha… »

Aln regardait Jion avec incompréhension. De quoi parlait-il ? Il avait détruit le village ? Cela ne voulait quand même pas dire…

« Jion, qu’est-ce que tu veux dire par là ? »

Il crut percevoir une étincelle de raison dans les yeux de son ami, mais elle s’éteignit aussitôt. Jion hurla comme une bête. Non, plus qu’un hurlement, c’était un hululement, comparable à celui d’une Ombre. Il voulut se jeter férocement sur Aln, mais Rieln se plaça sur son chemin.
Inspirant profondément, le maître épéiste murmura des excuses, puis se prépara à l’affrontement

Un profond malaise saisit Aln aux tripes. Rieln avança d’un pas, mais quelque chose dans son attitude avait changé. Jion sembla le sentir lui aussi. Il se concentra sur son vrai adversaire, glapit, et alors que Rieln levait son sabre il recula d’un pas. Une lueur terrifiée se reflétait maintenant dans ses yeux noirs. Il poussa un grognement apeuré. Comme une bête acculée, il se jeta violemment sur Rieln, lequel abattit calmement son sabre, à une vitesse telle qu’Aln ne s’en rendit compte qu’en voyant la main ensanglantée de Jion.

Jion rugit, de douleur cette fois, puis jetant un dernier regard terrifié sur Rieln, il s’enfuit. Son adversaire resta tendu quelques instants, puis, sûr que Jion s’était bien enfui, il laissa échapper un soupir de soulagement en retournant auprès d’Aln.

Aln se laissa glisser au sol, l’esprit vide. Rieln passa à côté de lui, et lui posant la main sur l’épaule : « Viens. Rester ici ne changera rien. Parlons-en à l’auberge. », Puis, s’adressant à Calnig : « Où sont vos hommes ? Pourquoi ne sont-ils pas là ? ».

« Ils sont là. Enfin, leurs cadavres. »

Ce disant, il désigna deux cadavres parmi la quinzaine se tortillant encore sur le sol. Quand ils étaient entrés dans la pièce, les hommes encore debout avaient le regard mort. Ils étaient maintenant tous réellement morts, encore agités de spasmes incontrôlables.

« Je vois. Partons. La garde ne va probablement pas tarder à arriver. »

Ainsi, mené par Rieln, le groupe quitta les lieux. Mais Aln suivait sans réfléchir. En fait, il avait l’impression de laisser une partie de lui-même dans cette pièce maudite, et son esprit tournait à vide tandis que ses pas le faisaient avancer.

Ils arrivèrent à l’auberge sans encombre, et retournèrent dans le salon dans lequel ils étaient à l’origine. Le propriétaire les regarda entrer dans le bâtiment depuis son comptoir, une expression craintive et respectueuse sur son visage.

Aln s’assit silencieusement dans un des fauteuils. Il sentait le temps s’allonger, les secondes s’égrener lentement, lentement, comme si chaque minute devenait une éternité. Son esprit essayait désespérément de mettre de l’ordre dans ses pensées. Après ce qui lui parut être une heure, il jeta un regard significatif à Calnig. Ce dernier en comprit le sens immédiatement. Il se sentit humilié qu’un simple citoyen lui demande ainsi à lui, Calnig, de sortir. Mais il y avait dans ce regard quelque chose qu’il n’arrivait pas à identifier, qui l’effrayait même. Il sortit de la pièce à contrecœur.

Alors Aln se tourna vers Rieln, et lui raconta tout ce qui s’était passé jusqu’à maintenant. En détail. L’irruption de Jion, c’était la goutte qui avait fait déborder le vase, il ne pouvait plus assumer tout cela seul.

Il raconta comment toute cette histoire avait commencé, comment il entrait dans un monde onirique qui lui montrait le passé, comment ses parents l’avaient prévenu que les Ombres essayeraient de le tuer, comment ils étaient morts, et enfin le véritable but de sa quête.

Rieln écouta tout cela avec un air soucieux sur le visage. Ce qu’il entendait surpassait son imagination la plus folle. C’était quelque chose qui le dépassait probablement, comme cela dépassait déjà Aln, et il hésitait intérieurement quant à la marche à suivre. La logique, et son devoir, voulait qu’il prévienne son soi-disant employeur, le conseiller Eldyn, car cette histoire pouvait impliquer l’ensemble de la communauté des magiciens. Pourtant, au fond de lui il sentait qu’ainsi il trahirait la confiance d’Aln. Et il détestait ça. Lui qui avait dévoué sa vie seulement à l’épée et à la Coalition, lui qui ne s’était jamais lié à quiconque, il ne voulait pas perdre la seule amitié qu’il eût jamais acquise.

Aln avait fini son récit, et leva sur Rieln des yeux implorants. Le maître épéiste sentit sa gorge se serrer. Comme il aurait aimé savoir quoi dire…

Rieln inspira profondément.

« Je devrais raconter tout ça à mon oncle, le Conseiller Eldyn. Mais je ne le ferai pas. Après tout ce temps, quelques semaines ou mois de plus ou de moins ne changeront rien. »

Le soulagement se peignit sur le visage d’Aln.

« Je ne suis pas magicien, reprit Rieln, donc je ne peux pas deviner l’exacte ampleur de ce qui se passe. La seule chose que je puisse faire, c’est te proposer mon aide. Déjà, je vais envoyer quelqu’un à ton village pour en savoir plus. On perdrait trop de temps en y retournant, et maintenant que je connais toute l’histoire, je pense qu’il est urgent de trouver le laboratoire de l’archimage Ilksa. »

Il se tut quelques instants.

« Tu en as vu de toutes les couleurs… » Murmura-t-il enfin.

Aln sourit tristement, puis son visage s’éclaira.

« Mais en parler fait du bien. Merci de m’avoir écouté. Je devrais retourner au village moi-même, mais… Tu dois avoir raison. Il faut d’abord trouver le laboratoire. Ce n’est pas pour rien que Jion m’attendait ici, et comme il n’a pas attaqué tout de suite il ne doit pas pouvoir me suivre à la trace.
– Mmh… À propos de ça… Il a toujours été aussi bon épéiste ?
– Non. Avant, il était meilleur que moi, mais pas à ce point-là.
– Je vois… La prochaine fois… »

Rieln hésita, ne sachant pas comment formuler ce qu’il voulait dire.

« La prochaine tu pourras te battre à fond, l’interrompit Aln.
– Tu es sûr ?
– Oui. S’il est possible de le sauver, je ferais tout ce que je peux pour ça. Mais tel qu’il est maintenant… S’il attaque de nouveau, je doute que l’on puisse le raisonner. Et… Je pense que c’est ce qu’il aurait voulu s’il était encore conscient. Simplement, je serais incapable de le faire moi-même.
– Je comprends. J’espère que l’on n’aura pas à en arriver là. »

Aln acquiesça. L’avenir ne s’annonçait pas plus reluisant que le passé, mais il ne serait pas seul à l’affronter. Il songea avec reconnaissance au hasard qui l’avait fait rencontrer Rieln. Sans cela il serait sans doute déjà mort.

« Aïe ! »

Aln haussa les sourcils. Le bruit venait juste de l’autre côté de la porte. Il l’ouvrit brusquement, et Calnig vint s’écraser à ses pieds. Toujours assis, Rieln soupira.

« Calnig, votre père serait horrifié en vous voyant.
– Hé ! Ce n’est pas de ma faute ! Vous n’aviez qu’à ne pas m’exclure de la conversation ! »

Aln resta interdit. Où était passé le digne jeune homme qu’il avait vu jusqu’à maintenant ? Puis Calnig, se rendant compte qu’il parlait à moitié écroulé aux pieds d’Aln, se rembrunit et se releva. Essayant de prendre son air le plus sérieux, il regarda Aln sans ciller.

« Vous voulez vous renseigner sur votre village ? Je peux vous aider si vous le voulez, mais… »

Une lueur sournoise s’alluma dans ses yeux. Rieln haussa un sourcil.

« Mais comme vous ne voulez pas que votre père apprenne à quel point vous vous êtes ridiculisé ici, vous allez le faire de bon cœur. N’est-ce pas Aln ?
– Ah, oui, Calnig, j’apprécie votre aide ! »

Le dit Calnig referma la bouche l’air dépité. Encore raté.

Rieln reprit : « Et qu’avez-vous entendu en écoutant aux portes comme cela ?
– Euh… Comme des gens passaient dans le couloir, les premières phrases et la fin, lorsque vous avez parlé d’envoyer quelqu’un au village d’Aln.
– Hmm, très bien. Alors, je vous laisse vous occuper de cette partie.
– … Bien sûr. »

Aln remit alors à Calnig la carte que lui avait donnée l’ancien du village. Lorsque Calnig fit mine de la refuser, Aln lui précisa que son village n’était probablement sur aucune carte, et qu’en plus il était dissimulé par une magie d’illusion. S’il y avait encore un village à cacher.

En entendant cela, Calnig resta bouche bée. Quel genre de village était caché par magie ??? Il ne comprenait plus rien, et sentait que mieux valait ne pas demander à en savoir plus. Au passage, son père serait heureux de l’apprendre. Il sortit.

Rieln jeta un regard interrogateur à Aln. Celui-ci lui sourit d’un air fatigué.

« Dans tous les cas, même si Jion est devenu fou, ce qu’il a dit était assez clair. Je ne me fais pas d’illusions. Le jour de mon arrivée à Magasnin, il parait que l’on a vu d’étranges nuages noirs dans la direction d’où je venais. Je n’y ai pas fait attention à l’époque, et j’ai eu tort. Je n’ai pas trop d’espoir. »

Ce-disant, il se renfrogna, puis, s’étirant longuement, il bailla. La marche sous le soleil de plomb avait été épuisante, et les évènements de la soirée n’avaient rien arrangé. Aln avait le plus grand besoin d’une bonne nuit de sommeil. Le lendemain, ils partiraient dans les montagnes, et probablement cette fois-ci pour un voyage de plusieurs jours. En espérant que Jion ne les réattaque pas en cours de route.

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