Auteur : Mouton
Check : Faust
Se réconcilier avec Nyara : FAIT. Désormais, il est l’heure… de sa tâche.
CHAPITRE 8
[Une première journée de ménage]
– Bref, n’oublies pas que tu dois quand même faire le ménage, hein !
Nyara marchait à côté de Sahar et tous les deux se dirigeaient vers la cuisine, une pièce que le garçon n’avait toujours pas vue. Il soupira en y pensant : le deal était que si Nyara logeait Sahar chez elle, il devait faire le ménage quand il le fallait. S’il se souvenait bien, il devrait aussi parler de l’autre continent avec la fille quand ils deviendront plus proches. Cependant, il ne connaissait absolument rien de cet endroit : il venait de la planète Terre, pas d’un continuent se trouvant de l’autre côté de l’océan ! Il venait à peine de dire qu’il souhaitait être l’ami de Nyara, il n’allait sûrement pas lui mentir à propos d’une chose qui lui tenait tant à coeur…
– Il faudra que j’explique d’où je viens réellement, alors… mais quand elle apprendra cela, ne ne va-t-elle pas croire que je mens ?
Se présenter comme un voyageur venant d’un autre monde semblait inimaginable. Nyara n’allait probablement pas le croire et leur amitié allait en pâtir. Il ne voulait pas de cela… Peut-être le mensonge était-il au final la meilleure solution ? Sahar décida de ne pas se prendre la tête avec cela pour le moment.
Nyara poussa la porte devant elle avec force et entra dans la pièce sans attendre Sahar. Le garçon la suivit et fut impressionné par la grandeur de la cuisine. L’ambiance y était très médiévale alors que les murs faisaient modernes. Le four était le même que ceux qu’on voyait dans les films du Moyen- ge et fonctionnait probablement au charbon, mais cela ne collait pas à l’objet posé à côté : un micro-onde. Il avait l’air plutôt vieux, mais cela ne changeait en rien la bizarrerie de la chose. Une petite table rectangulaire se trouvait au milieu de la pièce sur laquelle une cruche à moitié remplie d’eau se reposait. Des assiettes d’un blanc surprenant étaient déjà disposés sur la table, comme s’ils allaient manger dans les quelques secondes à venir. Les couverts étaient faits d’un métal proche de l’argent, mais bizarrement chauds au toucher. C’était étrange, mais vu qu’il se trouvait dans un autre Monde, c’était probablement totalement logique. Il allait avoir du mal à s’habituer à sa nouvelle vie, quoique plutôt content d’être ici. Certes, il avait du mal avec Duzmog — le Monde qu’il habitait désormais —, mais il devait combattre les mauvaises choses et ne voir que les bonnes. Déjà, il avait retrouvé Nyara, et plutôt facilement. C’était une bonne nouvelle, une super nouvelle, même !
– Bref, hier, on a… pas mal mangé, on va dire, donc il faudrait que tu fasses la vaisselle. Je suppose tu sais nettoyer des assiettes, des couvertes et tout ça avec facilité ? demanda Nyara.
– Je pense que ça ira, répondit le garçon.
– Parfait ! Alors, je t’expliquerai le reste du travail quand tu auras fini cela ! Je te laisse faire, petit domestique !
– Hey…….
Sahar soupira quand il entendit la fin de la phrase de Nyara. Comme si c’était qu’un esclave… Ce qu’il n’était évidemment pas. Sahar prit les gants que la fille lui tendait et se tourna vers l’évier. Il aurait bien aimé l’étudier de plus près, mais le BAZAR qui s’y accumulait lui en cachait tout le reste. Au final, il ne savait même pas s’il y avait un robinet derrière !
– Vous avez… « un peu » mangé ?!!! Vous étiez combien ?? lâcha Sahar, étonné par la pile d’au moins soixante assiettes et couverts qui se trouvait devant lui.
– Oh, tu sais, on n’a pas beaucoup mangé, juste qu’on a rien lavé depuis… va savoir.
– Hey ! Je—
– Dis donc, tu vas quand même pas râler, hein ? Je veux dire, c’est ton job, je te loge quand même.
Sahar soupira, le bec cloué. C’était la vérité, il n’avait pas le droit de râler. Il accepta son sort et acquiesça. La fille sourit avec un « Bien. » Elle allait s’en aller mais se retourna finalement.
– Oh, et tu as moins d’une heure pour faire ça, on doit manger, nous ! dit-elle.
– Je n’y arriverai jamais !! s’exclama-t-il. Et puis, on a déjà des assiettes à table, à ce que je vois !
– Oui, mais… en fait, c’est aussi des plats sales, héhé… Seuls les couverts sont propres… je suppose ?
Sahar allait s’énerver quand elle s’élança hors de la pièce en rigolant. Il resta bouche bée devant la vaisselle qui l’attendait. Il n’allait jamais finir en une heure, se connaissant. Si seulement il y avait de la musique, il aurait au moins un rythme sur lequel travailler, mais là… C’était un silence embêtant que Sahar n’appréciait pas. Il aurait au moins voulu parler avec Nyara… Il n’avait pas d’autres choix que d’accepter son « sort ». Il sortit les assiettes pour les mettre sur le comptoir à côté tout en regrettant sa décision d’avoir accepté la condition de Nyara. Il avait tellement, mais tellement peu envie de faire la vaisselle… Même sur Terre il détestait cela. Ce n’était pas compliqué ; juste long et lent.
Quand le garçon retira toutes les assiettes et couverts, il découvrit enfin l’évier qui se présentait à lui : il était joliment marbré. Le robinet était d’un argent étincelant d’une propreté insultante. Sahar prit le bouchon noir qui attendait sur le côté et le mit sur le drain. Le garçon tourna le bouchon d’eau chaude et attendit que le bac de l’évier soit rempli pour commencer sa tâche. Il regarda à gauche et à droite pour trouver le savon, mais ne le vit nulle part. Il s’accroupit et ouvrit les tiroirs en bas pour y trouver des tonnes de produits. Les noms sur ceux-ci étaient tous inconnus au garçon. Les « choses » sur ce Monde n’étaient donc pas pareilles que sur Terre… Cela semblait logique. Il prit ce qu’il crut être le savon et en versa un peu dans l’eau chaude. Heureusement pour Sahar, c’était bel et bien du savon moussant. Les gants qu’il portait le dérangeait, mais il devait les garder… Il continua d’attendre tout en faisant bien attention à ne pas oublier de couper l’eau quand il faudrait.
– Je me demande comment je vais continuer ma vie ici, du coup… pensa le garçon en lâchant un soupir.
Lui qui rêvait d’action, d’aventure et de bagarres, de révélations et d’émotions… Il n’allait sûrement pas trouver tout cela en faisant du ménage. Il avait devoir se battre contre les poussières et les saletés, certes, mais ce n’était rien comparé à ce qu’on voyait dans les mondes de Fantasy et tout ce qui touchait au genre !! Il voulait vivre ce genre d’histoire, pas être une femme de ménage… ! Il n’avait pas le droit de râler davantage, mais il fallait comprendre sa déception. Cependant, Sahar savait qu’il était trop tôt pour juger si oui ou non, il allait vivre une vie aussi « ennuyante ». Il espérait réellement partir à l’aventure, et bientôt ! Il était vrai qu’il ne possédait aucun pouvoir et allait probablement se faire tuer en quelques secondes, mais avec Nyara à ses côtés, il avait déjà moins peur. C’était surtout d’elle qu’il était effrayé !
Voyant que l’eau approchait dangereusement du bord du bac, il coupa le robinet. Il trempa une première assiette et saisit fermement l’éponge étrange que lui avait sans doute laissé Nyara. Il commença à frotter et se perdit dans ses pensées, ne voulant pas se concentrer uniquement sur sa tâche. Il préférait penser à l’avenir dès maintenant.
– Il y a des chances qu’on parte à l’aventure, malgré tout ! s’imagina Sahar.
Il ne connaissait rien de ce monde, mais vu ce qu’il avait déjà expérimenté, Duzmog ne semblait pas être un lieu où tout le monde est gentil et où la bagarre est la dernière des solutions. Il était plus que plausible que l’aventure, ça se connaisse, ici ! Peut-être y avait-il même le One Piece… !!!
Sahar sourit en imaginant de telles bêtises et posa l’assiette sur le côté. Il allait devoir répéter ce mouvement encore, et encore…
– Quel ennui… soupira-t-il.
Le garçon continua à rêver de ses aventures.
Vu qu’il n’avait aucun pouvoir, il allait devoir trouver un autre moyen d’être puissant. Oh, il pouvait bien tenter de se faire un peu de muscle, mais… Jamais ! Jamais on ne le verrait faire 500 pompes par jour juste pour ça !. Ce n’était pas parce qu’il ne POURRAIT pas le faire, c’était surtout qu’il ne VOULAIT pas le faire. Certes, en quête de devenir fort et être puissant, il allait devoir améliorer sa condition physique, mais il n’allait sûrement pas se reposer uniquement là-dessus. Vu que Nyara semblait manier le katana, cela serait une bonne occasion pour lui demander des conseils… Si elle acceptait, Sahar serait prêt à se baigner dans la sueur dans le but de devenir plus fort. Il était motivé à s’entraîner encore et encore. Il ferait plus ou moins tout pour avoir la chance de vivre une aventure hors du commun avec Nyara. Il rit quand il pensa à ses amis qui allaient être jaloux quand ils allaient apprendre que Sahar avait été Isekai, ahah !!
– Ahah… ah… Mes amis… hein……
L’air amusé de Sahar se transformea en rictus attristé. Ses amis sur Terre… Il se demandait comment ils allaient tous. Il s’était déjà posé la question, mais aurait-il la possibilité de les revoir un jour ? Ce n’était pas certain. Il était probablement bloqué sur ce nouveau Monde à tout jamais. Il allait devoir faire avec. De toute façon, il était plutôt content d’être ici. Certes, c’était un monde un peu fou à première vue, mais il n’avait encore rien vu ! Il était certain qu’il avait encore plein de choses à découvrir. Sahar n’avait toujours pas passé une journée entière ici. Il en connaissait peu sur Duzmog, au final. Il savait que des humains avec des attributs animaux existaient — Nyara étant une fille-renard. Il avait aussi observé que l’étoile d’un bleu magique qui brillait dans le ciel n’était pas comme le soleil. Les gens possédaient des pouvoirs et il existait des matériaux qui ne se trouvaient pas sur Terre. Il ne savait vraiment pas grand chose.
Au fur et à mesure, il allait apprendre un tas d’informations sur ce Monde et Duzmog deviendra sa nouvelle Terre. Il en était convaincu. Il n’avait qu’à éviter de mourir trop vite et faire de sa vie une aventure remplie d’action et de chance ! C’était certes naïf, mais il préférait penser comme cela. Être trop négatif, c’est mauvais pour le mental.
– Si Nyara m’apprend la maîtrise du katana et que je m’applique un maximum, je pense devenir fort en quelques mois… !
Cela aussi était probablement naïf ; et Sahar le savait très bien. Seulement, il avait envie d’y croire. Qui pourrait lui reprocher de penser positivement ?
Il adorait les énigmes, et il était plutôt bon en logique. Il jouait le plus souvent à des jeux de stratégie comme les échecs ou le go. En général, ç’avait toujours été son point fort d’élaborer des stratégies, et c’était souvent lui qui donnait les plans de bataille. Contrairement aux apparences, Sahar savait très bien utiliser sa tête. Quand il n’était pas submergé par ses émotions. En bref, il fallait juste qu’il soit calme. Quand il fallait résoudre des énigmes, il était le premier à être choisi. Il était si fort aux échecs que personne dans sa classe ne voulait l’affronter, vu les roustes qu’il leur mettait. Cependant, Sahar savait que comparé à des Grandmasters ou des Internationnal Masters, il n’était pas grand-chose. Il en avait déjà affronté quelques uns en arène et n’avait gagné que deux fois.
Sahar posa la dernière assiette sur le côté et soupira avec soulagement. Il lui restait encore tous les couverts. Il avait bataillé presque une heure sur les assiettes, donc il ne devait pas lui rester beaucoup de temps. Il avait passé les trois quart du temps à s’ennuyer et l’autre quart d’heure à réfléchir. Son ventre hurla à son humain qu’il avait faim.
– J’espère qu’ils ont des bons plats… souhaita le garçon.
Il commença à laver les couverts quand…
– Ah, toujours pas fini ?
… Az rentra dans la pièce.
Sahar se retourna pour lui répondre, mais évidemment, il ne vit personne.
Az restait toujours invisible aux yeux du garçon.
– Il ne manque plus que les couverts, ça devrait prendre quelques minutes au maximum… répondit Sahar.
– Je vois, je vais déjà mettre les assiettes sur la table. Merci du travail.
– C’est mon job, héhé…
Sahar sourit à la fin de la phrase et espéra qu’Az en avait fait de même. Le garçon sursauta en voyant les assiettes s’envoler ; il avait oublié durant deux secondes qu’Az était invisible… alors qu’il y avait pensé il y a trois secondes. Malgré ses facilités en logique, Sahar se dit qu’il était parfois totalement idiot. Azgoria rigola en voyant le garçon se mettre la main sur le torse.
– Un jour tu pourras voir ma beauté éternelle, promis, promis ! plaisanta Az.
– Hâte de voir ça…
L’homme invisible disposa cinq assiettes sur la table. Une pour Nyara, une pour Sahar, une pour Creel, une pour lui… et l’autre ? Qui était le cinquième ? Sahar allait lui poser la question quand il vit la dernière assiette voler dans les airs pour rejoindre les siennes sur le comptoir. Le garçon se tut et attendit une explication.
– J’ai mis une assiette en trop parce que je pensais qu’on avait un autre invité aujourd’hui, mais il ne viendra pas avant un petit temps, je suis bête, ahah ! dit Az en regardant probablement Sahar.
– Qui donc ?
– Un ami de Creel qui vient parfois, il est assez bizarre vu qu’on ne voit jamais son visage et ne parle jamais, mais cela reste un invité. On traite bien les gens, nous !!
– On m’a plaqué au sol et on a failli me tuer, mais je suppose que oui… sourit le garçon.
– Des détails, des détails, rien de grave.
– Je sais pas si c’est « rien de grave » non plus !!
L’homme rit à plein poumons et s’éloigna un peu du comptoir pour s’asseoir sur une chaise. Il s’arrêta et lâcha un petit « Héhé ».
– Sinon, ça va mieux avec Nyara ? demanda-t-il après son éclat de rire.
Le garçon acquiesça en posant les couteaux à droite des assiettes. Il connaissait ses manières, au moins. C’était grâce à ses parents qu’il savait comment manger correctement. Merci à eux !
– Je me suis réconcilié avec elle. Après…
– Après ?
– Après, on ne peut pas encore se considérer comme « amis », mais je suis confiant pour bel et bien le devenir. Je… J’ai envie de voir comment notre relation peut s’améliorer.
– Tu apprécies notre Nyara, n’est-ce pas ?
– Compliqué à dire, parce que, bah, on ne se connait pas du tout. Je ne sais rien sur elle, elle ne sait rien sur moi. Cependant, je sens une « connection » entre nous, j’ai un bon pressentiment. Je pense qu’elle va vite devenir ma meilleure amie !
– Nyara, malgré les apparences, est une fille très douce et charmante, après tout. Parfois, on dirait qu’elle a à peine huit ans, c’est mignon… mais perturbant, quand on connait son côté… plus violent, comme t’as sûrement dû le découvrir il y a quelques heures… Désolé pour toi.
Sahar secoua la main de gauche à droite en hochant la tête. Il l’avait mérité, après tout. Il n’avait peut-être pas mérité de frôler les portes de la mort, mais une bonne raclée, cela remettait les idées en place.
– Je le méritais quand même, je ne peux pas le nier… dit-il.
Az ne fit aucun bruit et le silence s’installa. Sahar venait de finir de laver les derniers couverts. Il se passa la main sur le front et soupira.
– Enfin fini… lâcha-t-il.
– Tu as toujours le nettoyage qui suivra après le souper, tu sais ? dit Az.
– Pas besoin de me le rappeler… Sinon, ta relation avec Nyara, c’est quoi ?
Aucune réponse de la part de l’homme. Sahar décida de changer de sujet, voyant qu’Az semblait ne pas vouloir répondre ; ce qu’il trouvait étrange.
– …… Sinon, cette maison, c’est la vôtre ? demanda-t-il.
Cette fois-ci, l’invisible daigna répondre à la question.
– Exactement, on vit ici depuis… longtemps.
– Je vois, et vous restez ici tout le temps ?
Sahar voulait savoir d’avance s’ils allaient partir vivre des aventures ou non. S’ils restaient tout le temps dans cette maison, le garçon saurait au moins ce qu’il l’attendait : pas grand-chose d’excitant. Az sembla souffler du nez, mais cela était peut-être une impression de Sahar.
– Il arrive que parfois on nous confie certaines missions, comme retrouver ceci ou bien tuer un tel… C’est Nyara qui avait proposé de faire cela pour qu’on puisse gagner notre vie, et ma foi, cela marche plutôt bien.
Sahar n’aurait pas cru qu’ils faisaient ce genre de chose. C’était très intéressant et il en était content : il était donc possible qu’il parte, lui aussi, en mission !! Tout espoir n’était pas perdu ! Après, cela allait dépendre de la nature de la mission, vu qu’il était actuellement faible… Très faible.
– Ceci dit, on ne partira pas avant deux bonnes semaines d’ici, lâcha Azgoria.
Sahar baissa la tête, déçu. Deux semaines, ce n’était pas rien. Il décida de voir le bon côté des choses : il avait le temps de s’entraîner un peu et en apprendre plus sur ce Monde. Cependant, il aurait voulu visiter Duzmog plus rapidement. Sahar n’aurait qu’à en profiter pour tisser des liens plus profonds avec Nyara. Il pourrait tenter de devenir ami avec Creel aussi ?
– Je pense qu’on s’entend déjà bien, Az et moi… pensa Sahar en souriant.
Azgoria était celui qui semblait faire en sorte qu’il puisse rester ici. Déjà au début, Az avait « protégé » Sahar de Creel. Ensuite, il le trouvait sympathique. Il semblait apprécier le garçon aux cheveux gris et ne montrait aucune hostilité malgré l’incident. Az était quelqu’un que Sahar appréciait déjà beaucoup. Il avait bien envie d’être un de ses amis proche aussi.
– Enfin, quand on finit nos missions, on revient toujours, finit Az. Quand on part…….
– Heya !!!
Sans prévenir, une fille au sourire magnifique entra dans la pièce, joyeuse comme tout. Sa queue de renard battant frénétiquement derrière elle. Elle fixa le garçon aux cheveux gris avec un air rempli de bonheur.
– Alors Sahar, t’as fini ?! lâcha-t-elle.
Il acquiesça en montrant la table. Elle était prête, il ne manquait que la nourriture et les boissons. Nyara mit une main sur le menton et hocha la tête.
– C’est du bon travail, du bon travail ! fit-elle, toute excitée pour une raison encore inconnue.
– Tu as l’air d’incroyable humeur, Nyara. Je suppose…
– On mange de la SALSAAAAAAAA !!!!!
Levant les bras en l’air, la fille ne cachait pas sa bonne humeur. Derrière arrivait Creel, qui portait trois sacs sur ses bras plutôt musclés. Sahar supposa qu’à l’intérieur se trouvait de la nourriture en masse, vu comment ils étaient remplis. L’homme les posa sur la table et regarda dans le vide, vers le comptoir de la cuisine.
– Je sais que ce n’est pas ce que tu préfères, Az, mais…
– Si on s’en prive juste parce que je n’aime pas, je ne pourrai même plus me voir dans une glace.
Sahar trouva que c’était une réflexion mignonne de la part de l’homme.
– C’est sympa qu’elle aime tant que ça la Salsa, tant qu’à la voir être heureuse, ça ne me dérange pas d’avoir des envies de vomir… finit-il.
Sans pour autant voir physiquement l’homme, Sahar sembla voir et même sentir le sourire d’Az. C’était un sourire réel, un sourire plein de bonté et d’amour. Peut-être était-ce un peu exagéré, vu que ce n’était que de la nourriture, mais Sahar trouvait cela adorablement doux. Le garçon sourit à son tour et retira ses gants. A l’entendre, Az semblait dire que cette « Salsa » n’était pas du tout ragoutante. Sur Terre, en tout cas, ce terme était juste donné à la sauce ; souvent plus attribué à des sauces piquantes. Si c’était le cas ici aussi, Sahar en prendrait bien, mais était-ce là tout ce qu’ils mangeaient… ? Enfin, ce n’était quand même pas QUE de la sauce ? Creel ouvrit les sacs et révéla leur contenu à tous. La fille toute excitée à l’idée de manger de la Salsa prit une boîte pour elle toute seule et la posa sur son assiette. Des étoiles dans les yeux, elle regarda malicieusement le garçon.
– Tu vas en manger, hein ?!! lui lança-t-elle. Eux deux, ils ne veulent jamais en manger plus d’un paquet, c’est tellement peu ! Deux, voire trois, c’est ça qu’il faut manger !!
Elle regarda agressivement les deux hommes qui levèrent les mains, comme coupables.
– Az n’aime pas, et j’aime moyennement, c’est tout… répliqua Creel en prenant une boîte à son tour.
Il la posa sur son assiette et dégagea le film plastique au-dessus de ce qu’on aurait pu prendre pour une barquette. On l’aurait dite faite d’aluminium, mais quand Sahar en prit une à son tour, il sentit instantanément que ce n’était pas ça. On aurait plutôt dit du carton, mais avec un quelque chose d’indescriptible.
– Comme de la frigolite… Je suppose, se dit-il.
Il imita les trois autres et retira le film plastique. Une odeur familière vint lui chatouiller les narines et il prit une grande inspiration. Il baissa le regard pour observer sa pitance. Du curry. Même s’il n’aimait pas les légumes, les choux-fleurs avaient l’air succulents. Ils étaient d’un orange appétissant qui firent gronder de bonheur le ventre du garçon. Ce dernier ne voulait plus attendre pour avaler ce plat. Il prit la fourchette dans la main et piqua dans la boîte avec impatience. Il enfourna une grande bouchée de curry. Le goût des pommes de terre effaçait un peu celui des choux-fleurs et des épices, mais le mélange étaient exquis. Le plat était très bien présenté, comme il l’avait connu sur Terre : les feuilles de curry étaient disposés un peu partout et rehaussait d’un joli jaune le reste des ingrédients. Sahar hésitait quand à la couleur de tout cela, mais il préférait profiter du goût plutôt que de se torturer les méninges avec des questions aussi idiotes. Chez lui, sur Terre, on appelait ce plat « Aloo Gobi », un plat typiquement indien qu’on qualifiait de « curry sec ». Ses parents lui en préparait, parfois, mais c’était quand ils avaient envie de manger quelque chose de spécial. Il avait toujours adoré le curry, que cela soit ce plat en particulier ou avec du poulet. Profitant de chaque bouchée, il ne put s’empêcher de sourire en mangeant le Aloo Gobi. Ce qui différenciait ce plat de celui que préparait ses parents, c’était le manque d’oignons. Il sembla à Sahar qu’un arrière goût d’ail lui parfumait la bouche, mais il n’était pas certain que ce soit cela. Dans tous les cas…
– Moi, j’aime énormément ce Aloo… Enfin, cette Salsa !! lâcha-t-il en regardant Nyara.
La fille, la bouche remplie, le regarda avec espoir et une touche d’admiration.
– T’as ‘u !!! dit-elle, la bouche pleine. ‘Est trop ‘on la Sa’’aaa !!
– Ne parle pas la bouche pleine, Nyarasmotte, soupira Az, n’ayant toujours pas touché son plat.
Sahar trouvait cela dommage que l’homme invisible n’aime pas un tel délice, mais chacun ses goûts, après tout. Quant à Creel, il mangeait doucement sa « Salsa », mais il ne semblait pas détester cela ; bien au contraire.
– Sinon, Sahar.
– Mmmh ?
– Tes parents ne vont-ils pas s’inquiéter pour toi ? demanda-t-il. Tu nous avais tout simplement dit que tu étais sur ce continent-ci parce que la situation était « compliquée », mais on ne sait rien sur toi. On ne veut pas qu’on pense qu’on t’aie kidnappé, quand même.
– ……
Le garçon ne sut quoi répondre. Il était vrai qu’il n’avait jamais réellement expliqué la raison pour laquelle il était sur ce continent. Évidemment, il n’allait pas leur dire qu’il venait d’un autre monde, surtout qu’il avait déjà menti en disant qu’il venait de l’autre continent. Que devait-il répondre ? Sahar ne voulait pas trop mentir, surtout qu’il voulait gagner leur confiance. Si un jour ils apprenaient que Sahar avait menti… Il ne voulait même pas imaginer ce qu’il se passerait, la déception dans leurs yeux……
– Mes… parents……
Dans la tête de Sahar passa des images qu’il connaissait bien : celles de ses vrais parents. Ils étaient restés sur Terre, se tracassant probablement à propos de leur fils disparu, Sahar. C’était le réel problème avec le fait d’être téléporté dans un autre Monde. Le garçon n’aimait pas le fait que ses parents et ses amis ignorent toujours qu’il était en sécurité…
– Enfin, est-ce que je suis réellement en sécurité, ici… ? se demanda-t-il en esquissant un sourire amusé.
Le garçon baissa un peu la tête, ce qui interloqua la fille aux oreilles de renard. Cependant, elle continua à manger comme une goinfre en attendant la réponse de son « invité ». Après réflexion, Sahar décida de continuer dans son mensonge, même s’il n’aimait pas cela.
– On… s’est disputé et… on va dire que j’ai fui. C’est lâche, mais… Je n’ai pas envie d’en parler.
Si Sahar faisait en sorte qu’on pense que c’était un sujet sensible pour lui, il était possible qu’on ne lui pose plus aucune question sur ses parents et la raison de sa venue sur ce continent. C’était ce qu’il espérait, en tout cas.
– Je vois… lâcha Az. Si tel est ton choix. Cependant, du coup, comment es-tu arrivé ici ?
C’était une question que Sahar redoutait, mais il s’était préparé à la recevoir. Alors qu’il faisait la vaisselle, il y avait déjà pensé à l’avance. Malin le lynx !
– J’ai demandé à un ami de me téléporter quelque part où mes parents ne me trouveraient pas, expliqua Sahar. Je ne pensais pas être téléporté sur l’autre continent, enfin, celui-ci, cependant……. Il m’impressionne et il me fait peur à la fois…
Sahar tentait d’être le plus crédible possible, mais lui-même savait que si on lui posait encore des questions, il allait se trahir. Il était même plus que probable qu’il y ait déjà une incohérence. Il espérait juste qu’on ne la remarquerait pas, si c’était le cas.
Les trois autres restèrent silencieux durant une longue minute. Ce fut Nyara qui brisa le calme.
– C’est… impressionnant. Déjà juste de pouvoir téléporter quelqu’un, c’est incroyable, mais aussi loin… Il est puissant à quel point, ton ami ?
La fille était impressionné par la capacité inventé de l’ami inventé de Sahar. Naturellement, Nyara ne savait pas que le garçon mentait. Creel semblait ne pas questionner ses propos et Az n’avait rien dit. Sahar avait peur que l’homme commençât à douter. Le garçon se tourna vers sa future amie.
– Je suppose… répondit-il brièvement.
– Je vois, tu as une relation compliquée avec ta famille, donc… lâcha enfin Azgoria.
– Ce n’est rien de bien grave, c’est un peu la crise d’adolescence !
Personne ne comprit sa blague. Le terme « crise d’adolescence » n’existait pas ici ?!! Il allait devoir faire attention à ce qu’il disait… encore plus que prévu.
Après quelques minutes de repas et de blabla, les quatres personnes se levèrent de table avant de poser leurs plats et couverts près du lavabo. Sahar, alors qu’on ne lui avait pas encore demandé, s’occupa de la vaisselle et fut remercié par les autres. Nyara l’attendait pour lui assigner sa prochaine tâche.
Quand il en eut finit avec la vaisselle, Sahar suivit la fille dans le long couloir de la maison. Ils passèrent la chambre de la fille et arrivèrent devant une porte identique aux autres, mais elle menait à une pièce dont Sahar ne connaissait encore rien. Elle ouvrit la porte et laissa voir au garçon une immense pièce avec plein de vêtements à l’intérieur. Nyara lui expliqua qu’elle lui passerait plus tard des habits typiques de ce pays, parce que ceux qu’ils avaient actuellement… n’étaient pas fameux. Il sourit bêtement à la remarque de la fille.
Nyara ouvrit une nouvelle porte et montra à Sahar la pièce gigantesque qu’était la salle de bain. Il l’observa de ses yeux crépuscule avec attention. Une baignoire d’une propreté affligeante se trouvait à sa gauche, au même endroit que la douche. Des systèmes de jets sur le mur et dans le bain prouvaient que cette pièce n’était pas celle d’un pauvre. Bizarrement, cette salle de bain faisait très moderne et très « terrienne ». C’était comme si ce Monde-ci volaient le style de la planète Terre ! C’était idiot de se dire cela, mais cette pensée fit sourire Sahar. Nyara le regarda en se questionnant à propos du sourire soudain du garçon, mais elle l’imita très rapidement.
Sahar remarqua qu’au bout de la salle de bain se trouvait une toilette très belle et luxueuse. Il s’en approcha et vit que c’était pareil que sur son monde à lui. Sur un mini comptoir posé près de la fenêtre fermée étaient posées des papiers toilettes. Il en toucha un sans se soucier du regard de la fille et remarqua que c’était d’un toucher si agréable… ! Il tourna la tête vers la fille à côté de lui et lui demanda s’il devait faire quelque chose ici. Elle acquiesça.
– Même si on dirait que c’est très propre, l’eau est à changer toutes les semaines, expliqua-t-elle. Il suffit juste que tu ouvres le gros bac que tu vois là et que tu le vides dans un autre bac que je vais te donner, ensuite tu mets tout cela dehors et tu vas dans le sous-sol chercher une « nouvelle » eau, enfin, plus propre.
Nyara lui montra donc le premier bac et lui indiqua le sous-sol. Il finit par acquiescer et se mit au travail. L’autre bac que lui avait offert Nyara était plutôt petit, ce qui signifiait beaucoup d’aller-retours. Il soupira, mais se mit à la tâche. Il n’avait de toute façon pas d’autres choix.
Après presque trois heures de travail, Sahar en finit enfin. Il savait que ce n’était pas tout ce qu’il avait à faire, mais il était fier de lui. Cela avait été plus long que prévu, mais au moins, c’était fait. Les trajets aller-retours avec un bac rempli d’eau dans les bras étaient épuisants, à force. Il s’essuya le front et sourit, content du travail terminé. Il se dirigea tranquillement vers la chambre de Nyara, là où elle se trouvait : elle lui avait dit de toquer à la porte quand il aurait fini. Sahar arriva devant la porte et allait toquer quand…
– … déjà ?
C’était la voix d’Az.
– C’est comme ça. La première était dans deux semaines, mais cela… fit une autre voix connu de Sahar. On a pas le droit d’attendre tant de temps. Sinon, ils demanderont à des autres gens, je suppose.
– Pourquoi s’en occuper ?
Celui qui avait posé cette question se trouvait être Creel. La dernière voix était évidemment celle de Nyara. Sahar, ne voulant pas les déranger, préféra ne pas toquer à la porte. Le garçon pourrait attendre dehors sans écouter leur conversation, mais la curiosité prit le dessus et il mit une oreille sur la porte en bois.
– C’est plutôt important, continua Nyara. On pourrait laisser cela à quelqu’un d’autre, mais ça nous permettrait d’aller visiter la capitale et de faire déjà l’autre travail.
– Moi qui voulait faire une pause… La semaine dernière était déjà beaucoup trop chargée ! râla Az.
– Ce n’est pas n’importe quoi, ce qu’on nous a demandé……
Sahar ne savait pas trop de quoi ils parlaient, mais il était si curieux. Un travail ? La capitale… ?
– Je sais… Je sais.
– Pas d’excuse pour toi Az, du coup ?
– Je n’ai rien à redire. Cela m’énerve juste de devoir retourner travailler dès maintenant. Pas toi, Creel ?
– M’en fiche.
– Génial !
– …
Nyara semblait heureuse que les deux acceptent. Sahar écoutait toujours à la porte.
– Mais pour Sahar ? On fait quoi ?
Personne ne répondit à la question d’Azgoria. Le garçon derrière la porte retint sa respiration. Qu’est-ce que…….
– Si tu veux qu’on y aille, ça me dérange pas, mais n’oublies pas Sahar. On en fait quoi ?
– ……
– Il n’a pas de pouvoir, pas vrai ? Tu crois que…
– On n’a qu’à lui en parler, le coupa Nyara. On… verra après.
– …….
– Il a à peine commencé son travail qu’on va déjà le libérer, ahahah ? plaisanta Az. C’était rapide.
– On n’a pas trop le choix… soupira Creel. Et encore, si c’est une épine dans notre pied, il……
– On lui en parle. C’est tout.
Le garçon, bouche bée, retira son oreille de la porte. Il s’éloigna et fonça vers les toilettes, là où il devrait être s’il travaillait toujours. Il ferma la porte derrière lui et prit un bon bol d’air. Il n’eut pas le temps de réfléchir que la fille aux cheveux menthes entra dans la pièce. Elle semblait être pressée et ne voulait pas s’amuser : cela se voyait à sa tête.
– Sahar.
– O-Oui…… ?
– On doit te parler.
[Note : si vous voulez voir la cover que j’ai dessiné pour ce chapitre 8, c’est ici > https://twitter.com/NyaraSheep/status/1260531815636512773%5D
Merci pour le travail 🎊
J’indique une lettre oubliée :
Le four était le même que ceux qu’on voyait dans les films du Moyen- ge et fonctionnait probablement au charbon
J’aimeJ’aime
Merci d’avoir lu ! 😀
… Je suis nul.
J’aimeJ’aime
Le lien sur Twitter concernant la couverture ne s’affiche pas.
J’aimeJ’aime
Aie… Mon Twitter @NyaraSheep sinon, je suis déçu là
J’aimeJ’aime