10;Drops 9 — [Une vraie aventure]

Auteur : Mouton
Check : Faust


Le dernier Chapitre de l’Arc 1 est entre vos mains, désormais ! Sahar va enfin savoir si, oui ou non, il va pouvoir vivre d’aventures…


                                                                  CHAPITRE 9
[Une vraie aventure]

Le garçon suivit la fille sans discuter. Elle était silencieuse et perdue dans ses pensées. Sahar, lui, ne réussissait pas à se concentrer : trop de pensées tournoyaient dans son esprit pour qu’il fasse autre chose que suivre docilement Nyara.

C’était la troisième fois que Sahar entrait dans cette grande pièce. La première fois pour parler avec Nyara et Az. La deuxième pour se faire pardonner de la fille aux cheveux menthes.

Cette fois-ci, c’était pour discuter d’un voyage. Sahar en avait entendu une partie à travers la porte de la chambre de la fille, mais ça, elle n’en savait rien. Cela dit, il ignorait tout de la nature du travail en question. Il voulait en savoir plus.

S’il avait bien compris, ils allaient devoir juger si Sahar viendrait avec eux ou non là-bas — s’il se souvenait bien, ils avaient parlé de la capitale. Il avait hâte d’avance de voir cela ! Peut-être allait-elle ressembler aux villes dans les Fantasy ? C’était peu probable, mais il voulait y croire.

Je ne dois pas m’emballer trop vite, je ne sais pas encore si j’y irai… se calma Sahar.

Nyara ouvrit la porte et rentra dans la pièce. Sahar la ferma derrière lui et regarda l’homme aux cheveux mauves assis jambes croisées sur le canapé. Il était silencieux, tout comme l’était probablement Az — Sahar était certain qu’il se trouvait lui aussi aux alentours. La fille s’assit sur un des canapés et invita Sahar à faire de même. Il s’exécuta et remarqua que Nyara n’avait pas ses oreilles de renard sur elle. C’était vraiment étrange, cette aptitude à pouvoir cacher ses attributs de renard. Un jour, il comptait la questionner à propos de cela. Il était curieux, après tout.

– On doit te parler de quelque chose, rien de grave, fit la voix d’un homme invisible aux yeux de Sahar.

Le garçon avait désormais la preuve qu’Az était bel et bien avec eux. Il savait déjà de quoi ils allaient parler, mais il joua l’ignorance. Il ouvrit grand les oreilles.

– Il va falloir qu’on te PROPOSE quelque chose, plus exactement, précisa Creel.

– Q-quoi exactement ? demanda Sahar.

– Avant qu’on te le dise, c’est vrai que tu ne sais presque rien sur ce qu’on fait, pas vrai ?

Sahar hocha la tête. Creel esquissa un faible sourire sans lâcher son regard de Sahar.

– Sais-tu ce qu’est un « Missiopere » ?

Bien évidemment, Sahar l’ignorait totalement. On aurait dit du latin, mais malheureusement, le garçon ne connaissait rien de cette langue morte. Il hocha de nouveau la tête.

– Aucune idée, avoua-t-il.

– Cela ne m’étonne pas, bizarrement… soupira Creel.

– Le continent en dehors du continent doit être si… spécial… rêva Nyara.

La fille avait les mains jointes et levait les yeux. Elle semblait vraiment avoir envie d’en apprendre plus sur ce continent…… Qu’avait-il de si spécial ?

– Il l’est, lâcha Sahar.

Il aurait voulu dire toute la vérité, mais… Il ne pouvait pas dire qu’il venait d’un autre monde. On n’allait de toute façon pas le croire ; c’était de cela dont il avait le plus peur, en réalité. Creel décroisa les jambes et se mit à parler.

– Un « Missiopere » est une personne qui exécute des missions pour les autres, expliqua l’homme. Tu t’en doutes, nous sommes un groupe de Missiopere. Nous avons quelques affiches à la capitale ainsi qu’à d’autres endroits, dans des bâtiments officiels ou même parfois dans des bars. La plupart nous ignorent, mais ce n’est pas comme si nous nous cachions…

Il n’était pas certain que cela était la même chose, mais le système était plutôt pareil aux freelancers…

– On nous envoie une mission, quelque chose à faire, et soit on l’accepte, soit on la refuse. C’est plutôt rare qu’on repousse une proposition, mais je ne dirai pas que c’est impossible. Tu t‘en doutes aussi, mais nous gagnons une récompense pour avoir accompli une mission. C’est souvent des Kreyns**, mais on nous a déjà donné des objets de valeur ou autres. On ne fait pas cela gratuitement, c’est notre manière de vivre, tous les trois.

(** : Le “Kreyn” (ou des Kreynes) est l’argent utilisé dans le centre du continent. Certaines autres “régions” ont d’autres systèmes de monnaie.)

Sahar aimait bien ce concept et il se réjouit d’apprendre qu’ils ne restaient pas toujours à la maison : ils partaient à l’aventure.

Sahar savait qu’il était trop optimiste, mais s’ils acceptaient de le prendre avec lui, avec ou sans pouvoir, le garçon allait pouvoir voyager, lui aussi. Il n’allait pas pouvoir vivre « d’epicness » comme il aurait voulu, mais le temps viendra… Il en était convaincu !

Sahar continua à écouter avec le sourire accroché aux lèvres, ce qui réjouissait la fille. Creel acquiesça dans le vide et finit son explication.

– On nous envoie les demandes de missions par différents moyens, même si c’est souvent par la poste. On va voir tous les jours si on nous a envoyé quelque chose, finit-il.

– Ne crois pas que nous sommes si connus, plaisanta Az. Nous ne sommes rien comparé aux grands.

– Oui, oui, mais on ne peut pas nier qu’on a rarement des vacances.

Creel regarda Az avec des yeux mi-amusés, mi-ennuyés. Il se tourna vers Sahar et posa la tête sur son poing.

– Que cela soit pour arrêter un criminel ou rechercher quelque chose dans un endroit dangereux, on peut faire presque de tout, continua l’homme. Comme tu peux t’en douter, il y a certaines tâches dont on est incapable ou qui nous embêtent trop pour qu’on les fasse. Cela dépend parfois de notre humeur, après tout ; et de l’argent qu’on gagne.

Même dans ce Monde, l’argent était important. Sahar s’était toujours demandé si, quelque part, l’argent n’était pas ce qui dominait le monde. Il resta silencieux après avoir écouté l’homme et attendit qu’on lui pose cette « fameuse question ». Nyara, elle, semblait toujours penser à l’autre continent avec un sourire idiot.

– Bref.

Ce fut Az qui parla.

– On nous a donné une certaine mission qui n’est pas vraiment importante, à faire pour dans maximum dix-sept jours, expliqua l’homme. On comptait se reposer deux semaines, vu qu’on revient d’une mission ardue dans l’Ouest du pays. Cependant……

– Un criminel semble se balader dans la capitale, et personne ne s’en occupe.

Nyara était sortie de ses pensées pour rejoindre la conversation. Elle avait donc tout écouté.

– P-personne ne s’en occupe ? demanda Sahar, étonné.

– Il y a des gens qui s’occupent de ce genre de vermine, mais lui, il est comme invisible aux yeux des grands, expliqua Az. Je parie qu’ils s’occuperont de ce criminel s’il devient une plus grande menace, mais on ne va pas attendre cela. Je suppose qu’on peut s’en occuper.

Sahar se demandait s’il y avait des héros dans ce monde. Peut-être que les « grands » sont justement des héros, mais il n’eut pas le temps de demander.

– On pourrait y aller plus tard si on veut, mais on n’a seulement trois jours pour partir à la recherche du tueur, sinon ils prendront quelqu’un d’autre… dit Nyara. On gagne une grande somme et ça nous arrange d’éliminer un criminel ; on les on les hait.

– Je vois……

– Le truc, c’est qu’on va devoir partir dès demain. On prépare nos affaires dès aujourd’hui et le lendemain matin, on est dans la carrosse. En route pour la capitale.

Un criminel. Tout cela excitait Sahar. C’était une mission plutôt intense !!

Cependant, même si c’était intense, c’était aussi—

– C’est dangereux. C’est tout.

Creel fixa Sahar sans dire un mot de plus. Il attendait que celui-ci réagisse.

Le garçon s’y attendait, il ne pouvait pas le nier. Il était sans pouvoir, sans aucune force qui pourrait l’aider à survivre face au danger. Seul son intelligence stratégique pouvait le sauver — et encore. Il serait plutôt une épine dans le pied, pour eux… N’est-ce pas ?

Il ne connaissait ni le potentiel de Creel, ni celui d’Az. Cependant, Nyara, elle…… Sahar ne savait pas à quel point elle était forte, surtout comparée aux autres, mais elle possédait une grande force, il en était plus que certain. Elle n’aurait pas de mal à se battre contre qui que ce soit de « raisonnablement puissant ». Il devait avoir des personnes plus fortes qu’elle, mais il y avait toujours plus puissant que soit.

– Le problème, c’est que si on t’emmène avec nous, on a peur que…

– Tu sois une épine dans le pied, lâcha froidement Creel.

– …tu sois…… Hé !!

Nyara cria en se tournant vers l’homme. Elle soupira et avec une goutte de sueur sur le visage, regarda Sahar à nouveau.

– Ce n’est pas ça ! Pas… entièrement ça.

Sahar comprenait. Il laissa un sourire s’ancrer sur son visage et hocha de la tête.

– C’est pas grave, je comprends, dit-il. Je suis sans pouvoir, sans force… particulière.

Il ne pouvait plus le nier. Nyara allait parler quand—

– Ce n’est pas entièrement ça, le problème.

Az le fit avant elle. Le garçon leva la tête, les oreilles toute ouïe.

– Il y a trois choses qui posent problème, actuellement, expliqua-t-il. De un, oui, tu n’as rien qui sort du commun. Je ne sais pas si tu es super intelligent, mais si tu as pensé que tenter de lever la main contr Nyara était une bonne idée, je ne peux pas le croire.

– C’est……

– Que cela soit parce que tu étais super déçu ou parce que tu te laisses emporter par tes émotions, cela ne change rien. Je ne dis pas tu n’est pas intelligent ; je dis seulement que tu n’es pas un génie absolu. Et puis même si c’était le cas, avoir un bon cerveau ne suffit pas à survivre contre les dangers de ce Monde. Tout comme la force elle seule ne fait pas tout. Il faut un bon mélange entre les deux.

Sahar était entièrement d’accord avec lui. Az continua.

– Le deuxième point qui pose souci, c’est la confiance qu’on te porte. On t’a accepté, d’un côté parce que Nyara t’a pardonné, de l’autre parce que tout le monde fait des erreurs, même si c’est complètement stupide. Creel prendra plus de temps à t’accepter que Nyara ou moi-même, mais si tu prouves que tu es digne de confiance, je ne vois pas le souci. Je sens que tu es quelqu’un de bien et je peux comprendre ta grosse déception, mais ça retarde l’amitié entre nous. Tu peux comprendre.

– Ouais……

Il fuit du regard tout en répondant. Il n’en était toujours pas fier et cet événement restera probablement à jamais dans son coeur. Il ne pouvait toujours pas se pardonner… Même si Nyara, elle, l’avait fait.

– Ne crois pas non plus qu’on te déteste. Actuellement, c’est comme si tu étais un nouveau membre dans la famille, mais qu’on vient à peine de se connaître. C’est ce que tu es, en fait.

Az n’avait mis aucune hostilité dans sa phrase. il avait juste l’air… sympathique. C’était des mots plus réconfortants qu’autre chose.

– Le troisième problème…… c’est pas vraiment un problème… Pas réellement.

Az sourit.

– Le truc, c’est que si on t’accepte ici, en premier lieu, c’est pour que tu nous aides au ménage en échange. Tu vis avec nous, et toi, tu nous aides au ménage. C’est l’accord. Cependant, si tu viens avec nous… Tu n’auras pas vraiment de ménage. Tu vivras avec nous gratuitement, et on n’aura rien en retour. Si on se connaissait mieux, je n’aurais pas trop de problème avec ça, mais…

– Je comprends, je comprends… dit Sahar en se mordant la lèvre inférieure.

Nyara agita les mains devant elle.

– Ne le prend pas mal, hein !! cria-t-elle. Juste, on ne peut pas se dire « Et si on allait en mission avec le nouvel invité qu’on ne connait depuis même pas une demi-journée et dont on ne sait presque rien, qui n’est pas puissant ni rien et qui pourrait mourir en une journée, voire moins » !!

– Ho ! Je dois le prendre bien, ça ?!!

– Heu… Je suppose ? Enfin, oui, oui !

Sahar soupira à nouveau, peu convaincu. Az, lui, rigola tout seul : Creel avait roulé des yeux.

– Tu comprends ? demanda ce dernier.

Sahar acquiesça, ne sachant pas quoi répondre. Est-ce qu’il avait la possibilité de les convaincre de le prendre avec eux… ? Il en doutait.

– Je ne vais pas te mentir…

Sahar se tourna vers un canapé vide, là où se trouvait probablement Azgoria.

– … moi ça m’est égal. Tu peux venir avec nous sans souci.

Le garçon ouvrit grand les yeux, étonné. Creel, lui, fronça les sourcils. Nyara se tourna vivement vers l’homme que ne pouvait pas voir Sahar.

– Nyara t’as plutôt facilement pardonné et semble… juste heureuse d’avoir quelqu’un d’autre ici.

Sahar resta silencieux, bouche bée. Creel sembla vouloir parler, mais il se tut finalement. Az continua sans se préoccuper de l’air gêné de la fille.

– Juste à la voir, je sens que vous pouvez devenir bons amis sans souci. Malgré ce qu’il s’est passé, elle semble encore t’être attachée. Si, moi, ça me dérange un peu que tu viennes avec nous, c’est surtout pour le premier point.

Même si Sahar ne voyait pas Az, il put ressentir le sourire qu’il faisait.

– Je n’ai juste pas envie que tu sois en danger.

Sa voix vibrait d’une grande compassion, choquant même Nyara. Sahar sentit une petite boule se former au niveau de son ventre, ainsi qu’à la gorge. Il n’allait sûrement pas pleurer, mais tout cela… l’émouvait. Il l’avait dit avec une telle…… Il ne pouvait pas l’exprimer. C’était quelque chose d’inexplicable avec les mots. Sahar sourit et acquiesça. Il regarda la fille qui était toute rouge ; elle tentait de son mieux pour garder son sérieux.

– Je comprends. Cependant…

Sahar serra un poing.

– Je veux lui prouver… non, VOUS prouver que je suis un ami de confiance. Je sais qu’il faut du temps et des preuves, mais je… je veux, enfin, j’aimerai partir avec vous pour la mission. Cela ne me dérange pas si je dois parfois rester à la maison et vous attendre ou quoi que ce soit, tant que… Heu… Je suis nul pour parler, comment dire…

Tout d’un coup, alors que le silence régnait depuis quelques secondes, Az éclata de rire. Sahar regarda dans le vide en clignant des yeux et savoura l’air amusé de Nyara. Celle-ci se frotta le menton et fixa le garçon.

– Tu veux bien qu’on te laisse à la maison et que tu attendes notre retour ? Tu es notre animal, ou quoi ? lâcha-t-elle en riant.

Il rougit et secoua la tête pour dire que ce n’était pas le cas. Az se calma et SOUPIRA bruyamment.

– Si on accepte que tu viennes avec nous, dans tous les cas, tu ne pourras pas toujours être avec nous. Cependant, ne crois pas qu’on va te laisser enfermé à l’intérieur ou quoi que ce soit ! dit-il avec un ton jovial. Si tu veux venir, montres au moins que tu sais un peu t’imposer ! Je ne sais pas, essaie d’insister ou quelque chose dans le genre ! Tsk.

Il claqua de la langue avec un air taquin.

Sahar ne pouvait pas nier le fait qu’il voulait rester avec eux. Parce qu’ils voulaient en savoir plus sur eux, parce qu’il appréciait Nyara, parce qu’il n’avait nulle part d’autre où aller et parce que la fille était une kitsune*. Certes, quelques raisons se trouvaient être plutôt égoïstes, mais n’avait-il pas le droit de l’être un peu ?

(* : Une kitsune est une fille aux oreilles de renard. Tout simplement.)

– Hé… Hé bah, j’insiste !

Sahar serra de nouveau les poings.

– J’aimerai… non, je VEUX partir avec vous ! Je… Je n’ai pas de force et vous n’avez pas besoin d’être protégé, je ne peux rien y faire, mais… Mais je ne serai pas une épine dans le pied !

Il regarda Creel. Celui-ci ne sourit pas : il ne fit que plisser faiblement les yeux.

– Je… Je deviendrai une force pour Nyara !

– En tant qu’ami, je suppose ? dit-elle, souriante.

– En tant qu’ami.

Sahar l’imita. Il avait osé dire tout cela sans bégayer, ce qui l’impressionnait lui-même. Ce n’était pas le genre de chose qu’il pouvait normalement sortir sans peur ! Il pouvait être fier de lui. Nyara mit une main devant la bouche et lâcha un petit rire mignon.

– Moi, ça me convainc, lâcha-t-elle.

– Moi ça me va, sortit Creel, mais il faut que t’aies conscience que si tu tentes quoi que ce soit de bizarre, je n’aurais aucune hésitation à te faire dégager par la force.

– Cre— !!

– Aucun souci.

Sahar coupa Nyara et lança un regard de défiance vers Creel. Certes, il avait un peu peur de lui, mais s’il ne pouvait pas s’assumer, comme venait de le dire Az, alors il ne méritait clairement pas de rester avec eux. L’homme croisa les bras et acquiesça.

– Si tout va bien entre nous, cependant, sois certain qu’on sera de bons amis, dit-il.

Nyara et Sahar se tournèrent vers Azgoria. Il prit un certain temps avant de répondre.

– Une seule condition, lâcha-t-il brièvement.

– Laquelle ? demanda Sahar impatiemment.

– Prends juste bien conscience des risques que tu prends, répondit Az. Si on te prend avec toi une fois et qu’on s’entend bien, tu viendras avec nous les prochaines fois. Si tu prends bel et bien conscience que tu peux mourir à n’importe quel moment, ça me va aussi. Je n’ai aucune raison de refuser que tu nous accompagnes si tu penses être une force pour Nyara.

Alors que Sahar avait été tout excité depuis le début, son moral retomba un peu. Il savait très bien que c’était risqué, mais lorsque qu’Azgoria lui rappela la réalité, son excitement descendit. Il était vrai qu’il allait devoir faire attention… Ce n’était pas juste des blessures qui l’attendaient, mais aussi…

… la mort.

S’il ne faisait pas assez attention, s’il faisait trop le fou, s’il prenait la confiance… Il ne savait pas à quel point ce Monde était cruel, mais il allait sûrement le découvrir.

Cependant.

– J’ai conscience des risques, répondit Sahar. Mais malgré tout, je compte bien vous accompagner. Je ferai attention et en plus, je vais tenter de m’entrainer. Peut-être Nyara peut-elle m’apprendre le katana, peut-être que je peux m’endurcir. Je ne compte pas rester sans rien faire. Je deviendrai une force pour Nyara, mais pas seulement en tant qu’ami.

Az sourit, apparemment convaincu. Satisfait de la réponse, il hocha.

– Si tel est ton désir, prends ton courage avec toi et viens avec nous demain. Toi qui n’as jamais rien vu de ce continent, tu vas sûrement apprécier la capitale !

Az se leva et regarda Creel, qui, lui aussi, se dégagea de son canapé. Ils se tournèrent vers Sahar.

– Finis ton travail quand même et Nyara te donnera des habits… plus adaptés. C’est vrai qu’on t’a laissé avec ceux-là qui sont… un peu déchirés et bizarres…

Creel sortit de la pièce sur ses mots et Az le suivit, mais juste avant de fermer la porte, il regarda à nouveau Sahar.

– …… Je compte sur toi.

– ……

Sahar ne répondit rien et laissa l’homme sortir. Il n’avait pas vu le regard bizarrement nostalgique de l’homme, ni qu’il l’avait fixé avant de sortir. La fille, voyant que les deux étaient partis, pris les mains du garçon, toute excitée. Sahar faillit lâcher un cri de surprise et regarda Nyara.

– C’est supeeeeeeeEEEER ! s’exclama-t-elle de joie. Je sais qu’on est pas encore amis, mais, mais, j’espère qu’on le sera vite !! Tu vas voir, visiter le pays, c’est génial !! On ira manger dans un bar, dans un restaurant et tout, et même que si tu veux, après cette mission, je pourrai t’entraîner au katana et je te montrerai quelques techniques qu’on m’a apprises !!! J’ai hâte, hâte, hâte ! Je-Je n’avais jamais eu d’amis avec qui partir avant !!!! C’est cool !!!

Sahar partageait son excitement, mais il ne se montra pas aussi énergétique. Il fondit devant ce mignon sourire. Une question sur le coeur, il n’hésita pas à la poser sur le moment.

– Az et Creel ne sont-ils pas tes amis ?

Nyara prit du temps avant de répondre, mais elle finit par hocher la tête.

– Même si je m’entends à merveille avec Az, il n’est pas ce qu’on appelle un « ami ». Pour Creel, c’est……. autre chose.

– Quoi donc ?

– C’est… mon frère, en fait.

– … Huh ?

Elle rigola en se grattant la joue.

– Héhé, ouais, mon frère. Je sais, on ne dirait pas !

La bouche bée, Sahar resta comme cela une bonne minute avant que Nyara le force à finir son travail.

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– Et… voilà !!!

Il était désormais le soir. Ils venaient de manger ce qu’on appelait des « Boulettes à la brunette », mais ce n’était que des boulettes sauce lapin. Étrangement, dans ce Monde, les aliments ressemblaient étrangement à ceux de la Terre. Excepté la boisson qu’il avait bu en arrivant sur Duzmog, mais c’était autre chose, ça.

Nyara hocha la tête en voyant Sahar. Elle trouvait que les vêtements qu’elle lui avait passé lui allait très bien. Sahar était du même avis et le prouva en souriant à la fille.

– J’aime beaucoup, c’est spécial, mais très classe ! lâcha-t-il sans mentir.

– Héhé !

Elle lui avait passé des habits qui traînait dans une armoire remplie de vêtements. Ils avaient testé plusieurs affaires, mais c’étaient ceux-ci qu’ils avaient choisi.

Le haut était une sorte de pull fait d’un matériau empruntant autant à la polaire qu’à la laine. Sahar n’avait jamais aimé porter la laine, vu que ça le grattait énormément. Cependant, cet habit était très doux et confortable. Il était d’un vert herbe foncé. Au milieu, là où se trouvaient les boutons pour fermer et ouvrir le pull, étaient dessinés des ovales fait d’un vert encore plus foncé. De même sur les coudes. Le bout des manches étaient colorées de jaune et de rouge, tandis que le pantalon était simplement bleu marine. Il était zébré de lignes bleu clair, devant et derrière. Les chaussures étaient d’un gris ni trop foncé, ni trop clair, rehaussées de motifs bleus, et que l’on ouvrait au moyen d’une tirette, sur le côté.

Tout cela faisait le « nouveau Sahar ». Il appréciait ces vêtements et il trouvait que ça le rendait plus unique. Il avait un peu réarrangé ses cheveux, mais il les trouvait toujours bordélique.

Il se regarda dans le miroir, devant lui. Il se renfrogna un peu et se toucha le côté gauche du visage, là où se trouvait une marque, une blessure. Il ne savait toujours pas comment il l’avait eu… Etait-ce la femme qui l’avait frappé ? Il ne voyait pas d’autre possibilité.

– N’y penses pas, ça ne te rends pas moche ou quoi que ce soit ! lâcha Nyara, derrière lui.

– Je sais, je sais…

Il trouvait cela plutôt stylé, au fond. Il n’en était pas forcément fier, mais ça faisait plus viril. Ce n’était que son impression. Nyara bailla et s’étira, ne cachant pas sa fatigue.

– Bref, on va avoir une longue journée, demain. Réveille-toi à sept heures, on mangera le petit-déjeuner bien plus tôt que prévu et on partira vers quarante. Bonne nuit !

– Bonne nuit.

Elle ouvrit la porte et ne la referma pas derrière elle. Sahar regarda de nouveau ses habits. Pour dormir, Nyara lui avait donné un pyjama identique au sien : orné de dessins de têtes de femme chèvre. Il ne l’avait pas encore essayé, mais il espérait bien qu’il était confortable !

Et il l’était.

Sahar regarda le ciel noir étoilé depuis le jardin. Il avait décidé de prendre l’air quelques minutes pour observer la « Lune » de ce Monde avant d’aller dormir. En tout cas, elle semblait identique à celle de la Terre : brillante, blanche, parcourue de cratères. Ce soir, c’était une demie-lune. Après, il n’était pas certain qu’ici, on appelait ce satellite naturel « Lune ». C’était une question à poser plus tard. Il prit une bouffée d’air frais et soupira tout en écoutant le son du vent. C’était si paisible… Quelle journée intense venait-il de vivre ! D’un côté, c’était si… excitant, d’un autre……

Tentons de ne pas revivre quelque chose de pareil… se dit-il.

Il laissa son regard se perdre dans la grandeur de la nuit et repensa à tout ce qu’il s’était passé aujourd’hui. Tant de choses pour une seule et unique journée… Heureusement pour lui, tout s’était bien finit. Cela aurait pu être bien pire…… !! Il était heureux que Nyara l’ait accepté, au final. Lui qui avait eu si peur… Sahar devra dire merci à Tadda, quand il pourra. L’homme aux cheveux blancs l’avait quand même bien aidé à voir ses erreurs. Sahar avait été si stupide et sans l’aide de Tadda, peut-être serait-il resté idiot encore pour longtemps…… Sahar devait réfléchir plus longuement sur ce genre de choses. Il devait aussi tenter de mieux contrôler ses émotions. Il allait le faire, il y arriverait… Il ne pouvait que croire en lui-même. Il cligna des yeux et se retourna vers la grande maison. Il allait… Il allait vivre une vraie aventure. Depuis tout petit, c’était ce qu’il espérait. Ce sentiment à l’intérieur de lui n’avait fait que grandir depuis le moment où il avait commencé à lire des mangas…… Qu’est-ce qu’il l’attendait ? Qu’allait-il découvrir, qu’allait-il vivre ? Il en avait des frissons d’avance… !! Il avait hâte !! Un grand sourire sur le visage, il marcha vers la porte d’entrée et pria pour que la suite de l’histoire se passe bien.

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Des tartines avec de la confiture. C’était assez simple, comme petit-déjeuner, mais cela suffisait au garçon. Il mangeait avec les trois autres, mais n’était pas trop impliqué dans leur conversation. Ils parlaient de choses qu’il ne comprenait pas réellement. Il les laissa discuter et savoura la confiture aux mangues. C’était si bon… !

Après avoir mangé tranquillement, Nyara prépara la carrosse. Pendant ce temps, Creel et Az étaient allés voir une dernière fois à la poste s’il n’y avait pas de lettres pour eux. Ils allaient revenir dans environ cinq minutes, et à ce moment-là, ils partiraient. Sahar, lui, aidait la fille à tout ranger. Ils n’avaient pas pris beaucoup d’affaires, mais il fallait aussi vérifier que les équipements sur la carrosse étaient tous fonctionnels. Après avoir tout vérifié, Nyara avait noté sur un petit papier ce que Sahar appréciait manger. Evidemment, comme il l’avait prévu, il y eut certains plats et ingrédients que la fille ne connaissait pas.

Après que les deux hommes soient revenus, ils se mirent dans le carrosse et se préparèrent à partir. Ils durent attendre Creel qui était allé faire « quelque chose » à l’intérieur de la maison. Aucun des trois ne savait ce qu’il y faisait, et ils ne comptaient pas lui demander. Nyara n’avait pas été surprise de voir son frère avec un grand sourire. Pourquoi était-il si content… ?

– On y va… ? demanda l’homme en s’asseyant à l’avant.

Seul Sahar se trouvait à l’arrière. Les trois autres profitaient de la belle vue, à l’avant. Il sourit en regardant à travers la fenêtre.

C’était ici……

Que commençait sa vraie aventure.

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– ……

L’homme était silencieux. Un verre dans la main, un tissu dans l’autre, il le lavait sans dire un seul mot. Les lumières éteintes, l’intérieur était d’une noirceur qui ferait peur à n’importe quel enfant. Derrière son bar, le vieil homme ne faisait que son travail.

– ……….

Il allait être l’heure. L’heure d’ouvrir. Il devait rapidement finir son travail. Les gens allaient arriver, il ne pouvait pas ouvrir en ayant encore des affaires sales ! Le comptoir avait déjà été lavé et les tables étaient resplendissantes, mais elles allaient montrer leur vraie beauté quand les lumières
s’allumeraient. Des rideaux empêchaient les rayons de l’étoile brillante de passer à l’intérieur du bâtiment.

– ……..

L’homme plissa les yeux dans l’obscurité avant de serrer les dents. Sur ses gardes, il déposa délicatement le verre sur le comptoir. Il avait presque terminé, mais il lui en manquait encore une dizaine. Ils ouvraient dans à peine dix minutes. Il avait certes le temps de finir ce qu’il avait à faire, mais il valait mieux finir le travail plus tôt que plus tard. Un bruit se fit entendre de l’autre côté de la pièce. Il sortit le couteau du tiroir et se prépara à se défendr—

– Tu veux réellement te battre ? Je ne te pensais pas comme cela, vieil homme !

D’une voix amusée, une personne se moqua de son ami. L’homme soupira et lâcha son couteau. Il était rassuré. Ce n’était qu’elle.

– Depuis quand je t’ai autorisé à rentrer sans ma permission, dis ? demanda-t-il en lavant un nouveau verre.

Elle ne daigna pas répondre à sa question et rigola. Après avoir s’être esclaffée, un bruit de chaise frottant sur le sol résonna.

– Des nouvelles… ?

– Ils ont accepté. Ils viendront dès ce matin. Ils commenceront donc dès aujourd’hui.

Même sans le voir, on pouvait ressentir le sourire de la femme. Avec un mélange de deux émotions opposées, elle semblait s’amuser de la situation. L’homme leva le regard, même s’il ne distinguait que la totale obscurité.

– Ne t’amuses pas d’une telle chose. Il doit être arrêté. Va ouvrir les rideaux, veux-tu ?

La femme ne dit rien et tourna les talons, se dirigeant vers les rideaux. C’est quand elle y arriva qu’elle finit par parler de nouveau.

– Pourquoi ne pas s’en amuser ? C’est une bonne chose, n’est-ce pas ?

D’un coup sec, tous les rideaux s’ouvrirent. Désormais, on voyait la femme et l’on notait d’abord son regard perçant. Un grand sourire sur le visage, il était impossible de dire si c’était de la malice qui s’y logeait ou bien autre chose. Que cela soit positif.

Ou négatif.

Ses yeux améthystes dévisagèrent le vieil homme qui lui rendit un sourire amical.

– Ne penses-tu pas être un peu trop excitée à propos de cela……

La femme se tourna vers les fenêtres. La lumière d’Etholys caressait ses joues, ses cheveux, ses yeux. Tout son corps. Même son âme. Aujourd’hui……

Il était temps que ce criminel meure.

– …… Bahama ?

La femme relâcha son sourire et prit un air sérieux. Elle se tourna vers l’homme. Ce dernier posa son verre propre sur le comptoir. Bahama regarda son poing et—

Je m’enflamme juste, c’est tout.

[C’est ici que l’Arc 1 de 10;Drops (Une nouvelle aventure) se finit. Après ses 9 chapitres, on peut aussi dire que c’est la fin du Prologue ! Dès le prochain chapitre, le 10ème de la série, nous entrons dans l’Arc 2 de 10;Drops (La ville de l’Immense) ! En espérant que vous appréciez toujours 10;Drops et pour ceux qui veulent des surprises… Restez attentifs, nous entrons dans « la vraie face » !!]

 

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5 commentaires sur “10;Drops 9 — [Une vraie aventure]

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